Synopsis

Au Cambodge, le mot « âphivoat », développement en khmer, est dans tous les discours politiques et économiques. Officiellement, c’est le développement d’un pays, d’un peuple dans son ensemble.

Après les cinq ans de dictature des Khmers Rouges qui ramena le pays à l’âge de pierre ont succédé dix ans de guerre civile. À la fin de cette période, le pays s’ouvre à l’économie de marché et un traité de paix est signé en 1991. Après les années de guerre, le pays était complètement détruit : plus de cadastre, deux médecins diplômés dans tout le royaume, des infrastructures inexistantes… Le Cambodge entre alors dans le capitalisme mondialisé, adoptant à marche forcée ses codes, sa culture, ses lois, et ses objectifs. Toute l’économie est désormais dirigée vers l’export pour doper la croissance. En vingt ans, le nombre d’usines textiles passe de 90 à plus 400. Elles concentrent aujourd’hui plus de 700 000 ouvrières.

Pendant l’hiver 2013-2014, les ouvrières du textile de la banlieue de Phnom Penh, la capitale du pays, manifestent massivement pour réclamer une augmentation de salaire.

Ces manifestations seront vite réprimées, puis interdites. En janvier 2014, la police militaire finit par ouvrir le feu sur les manifestants et fait six morts. La nouvelle classe ouvrière cambodgienne fait ses premiers pas, se cherche en tant que sujet politique et teste ses seules armes : les manifestations et la grève par la force du nombre.

Au Cambodge, parmi les riziculteurs de Battambang, il y a ceux qui continuent tant bien que mal, ceux qui sont devenus d’importants propriétaires de terre, ceux qui sont partis tenter leur chance à la capitale. Il y a l’arrivée des moissonneuse-batteuses et ces femmes qui, dans leur sillage, récoltent à la faux les quelques brins que les machines ont manqués.

À Phnom Penh, à l’ombre des tours en chantier et des panneaux publicitaires, il y a les touristes dans les tuk-tuk, la bourgeoisie dans leurs 4×4, les enfants des rues et les ouvrières du textile qui manifestent. Sur les routes en construction, les camions de riz croisent les camions amenant les ouvrières à l’usine.

Les uns s’en sortent, d’autres pas : « Happy Âphivoat Cambodia ! »